Les mauvais comptes de la Fédération française d'athlétisme
Tous les matins, on analyse le principal fait de l'actualité de l'économie du sport en France
La Fédération Française d'Athlétisme traverse une période de turbulences économiques et de gouvernance, révélant des "mauvais comptes" et une situation de déficit importante malgré le contexte des Jeux Olympiques de Paris 2024.
Le départ soudain de sa Directrice Générale, Souad Rochdi, sur fond de rupture conventionnelle coûteuse et de litiges comptables, a mis en lumière un "redressement budgétaire nécessaire" pour l'institution.
Des départs coûteux et un déficit dissimulé
Le changement de pouvoir à la tête de la FFA, avec l'arrivée du président Jean Gracia en remplacement d'André Giraud, a rapidement révélé des pratiques de gestion contestables. Le départ de Souad Rochdi, Directrice Générale, s'est soldé par une rupture conventionnelle avec transaction s'élevant à 333 865 € (hors solde de tout compte), un accord "jamais soumis au comité directeur". À cela s'ajoute la rupture conventionnelle du directeur juridique, Clément Gourdin, portant le "coût global pour la FFA" à près de 800 000 € sous l'intitulé "indemnité RCH".
Ces dépenses exceptionnelles viennent aggraver une situation financière déjà précaire. André Giraud avait pourtant affirmé, lors de l'assemblée élective, laisser une Fédération "à plus ou moins 5%" à l'équilibre et "en pleine forme". Cependant, la nouvelle équipe dirigeante a découvert "chaque jour de nouveaux cadavres".
Une première estimation fait apparaître un "déficit très conséquent", qui sera bientôt annoncé à 3,6 M€, soit 13 % d'un budget de 33 millions d'euros. La FFA a d'ailleurs déposé plainte pour "abus de confiance" et "faux et usage de faux" devant le tribunal de Paris, soulignant des "différends d'écriture comptable" entre l'ancienne et la nouvelle direction.
Des litiges comptables et des créances incertaines
Plusieurs lignes comptables font débat. Le stock de vêtements adidas, d'une valeur de 838 000 € sur le dernier exercice, n'est pas jugé "marchandable" par la nouvelle équipe et aurait dû être exclu du bilan. De même, les créances de la FFA sont évaluées à plus de 800 000 €, avec une "appréciation de la recouvrabilité" contestée.
Des athlètes doivent des sommes pour pension ou demi-pension à l'INSEP ou autres établissements, parfois à l'insu de leur agent, et une ligue régionale (Guyane) est en débours de plus de 100 000 €. L'ensemble des "pertes exceptionnelles" approche le million d'euros.
Paradoxalement, les retombées des JO de Paris 2024 (stages, billetterie, Club France...) auraient généré un surplus budgétaire d'un peu plus d'un million d'euros. Cependant, la Fédération a eu recours à des emprunts auprès de l'AEA (Fédération européenne) pour faire face à des difficultés de trésorerie, notamment en attendant le crédit des licences. Des factures impayées, dont un film de 120 000 € sur les Championnats du monde de Paris 2003, continuent d'apparaître.
Un modèle en question et un redressement nécessaire
La FFA est désormais engagée dans une phase d'économies drastiques. Chaque dépense est soumise à "double signature" avant d'être engagée. Frédéric Burlett, le nouveau trésorier, a prévenu que "le redressement engagé est plus qu'un chantier".
Cette situation interroge sur la gouvernance des fédérations sportives, qui, malgré leur statut associatif, gèrent des budgets importants et doivent faire preuve de la même rigueur comptable que toute entreprise. Le "modèle, très amateur, avec peu de contrôle, a montré ses limites", soulignant la nécessité d'une professionnalisation accrue des pratiques de gestion financière au sein des instances sportives nationales.
Les performances sportives, symbolisées par le slogan "Plus vite, plus haut, plus fort", devront désormais s'inscrire dans un cadre financier plus contraint, "avec moins d'euros". La justice, saisie, aura un rôle à jouer pour trancher sur d'éventuelles responsabilités.
À lire sur l’équipe 💰